< Virus

Qu’est-ce qu’une mutation pour le coronavirus SARS-CoV-2 ?

Texte mis à jour le 2021-01-14


Les virus mutent tout le temps. Les mutations du coronavirus SARS-CoV-2 qui affectent la protéine Spike, qui est la clef d’entrée du virus dans les cellules humaines et qui est aussi la cible des vaccins, sont particulièrement suivies par les scientifiques.

SARS-CoV-2 est un coronavirus à ARN (acide ribonucléique) : le support de son matériel génétique est un brin d’ARN (voir la question Que signifient les abréviations COVID, SARS, CoV, ARN, etc. ?). L’ARN est une molécule linéaire formée d’une suite de lettres (A, U, G ou C) que l’on appelle ribonucléotides. Le génome du SARS-CoV-2, c’est-à-dire l’ensemble du matériel génétique du virus, correspond à une suite de près de 30 000 lettres, ce qui fait de lui un « long » génome pour un virus. Il a été publié pour la première fois le 11 janvier 2020. 

Le coronavirus vit et se reproduit dans les cellules humaines. Pour se reproduire, il copie son génome au sein de la cellule qu’il a infectée, ce qui consiste à recopier chaque lettre de son brin d’ARN. De nouvelles particules de virus vont être formées dans la cellule infectée, contenant ces copies d’ARN et vont rentrer dans d’autres cellules et les infecter à leur tour. L’entrée dans la cellule se fait à l’aide de la protéine Spike du coronavirus qui se fixe sur certains récepteurs de la cellule, dits ACE2, sur lesquels la protéine Spike fonctionne comme une clef pour ouvrir une porte.

Lors de la copie du génome du coronavirus, des erreurs sont parfois faites : une lettre peut être remplacée par une autre (substitution), rajoutée (insertion) ou effacée (délétion). Ce sont les mutations et elles apparaissent aléatoirement. On ne sait pas quand, ni où elles vont apparaître dans la molécule d’ARN, ni quelle erreur va être créée. C’est un phénomène normal que l’on observe dans tous les virus. SARS-CoV-2 a un système de correction de ses erreurs et il y a donc globalement moins de mutations que pour d’autres virus qui n’ont pas de système de correction. A ce jour, plusieurs milliers de mutations ont été identifiées. Dans la majorité des cas, la mutation ne change pas les propriétés du virus. On parle de mutation silencieuse. Dans d’autres cas, cela peut entraîner des changements dans les protéines du coronavirus. Ces protéines déterminent la capacité de transmission, la vitesse de réplication et les capacités de contournement des défenses immunitaires du coronavirus. Des modifications dans les protéines peuvent donc parfois avoir un impact sur le taux de reproduction de SARS-CoV-2 (voir la question Létalité, mortalité, surmortalité, R0, kappa : de quoi parle-t-on ?).

La protéine Spike joue un rôle prépondérant dans la transmissibilité du virus et dans la stratégie vaccinale. En effet, les vaccins développés sont basés sur la reconnaissance de cette protéine Spike par le système immunitaire. En conséquence, les mutations affectant cette protéine sont très suivies par les scientifiques. Au 15 décembre 2020, les chercheurs qui analysent les coronavirus britanniques avaient identifié 1777 mutations différentes qui modifient la protéine Spike.

Les mutations apparaissent tout le temps. Certaines disparaissent juste après être apparues, quand le virus muté ne contamine personne. D’autres mutations vont persister dans le temps et vont se répandre au sein d’une partie de la population. En comparant les séquences des coronavirus issus de patients à différents moments et à divers endroits du globe, on peut trouver des virus qui sont très similaires les uns des autres et reconstituer la suite des mutations qui sont apparues les unes après les autres dans une série de personnes qui se sont infectées les unes après les autres. On peut ainsi reconstituer un arbre des mutations. Dans chaque branche de l’arbre, on a mesuré que pour SARS-CoV-2, environ 2 mutations apparaissent chaque mois. Quand le coronavirus est en circulation dans la population humaine et qu’il infecte plusieurs millions d’humains, il devient de plus en plus probable que la même mutation (le même changement dans la séquence d’ARN du virus) apparaisse indépendamment dans deux individus.


facebook twitter linkedin

Sources

Site mis à jour en continu qui recense tous les génomes de SARS-CoV-2.

A catalogue of mutations of SARS-CoV-2 coronavirus (COVID-19)

Le premier génome de SARS-CoV-2 a été publié le 11 janvier 2020 par le virologiste chinois Yongzhen Zhang suite à un coup de téléphone avec son collaborateur australien.

Cyranoski, D., Dolgin, E., Gaind, N., Hall, S., Ledford, H., Lewis, D., ... & Subbaraman, N. (2020). Nature's 10: ten people who helped shape science in 2020. Nature, 563-576.

Analyse de l’évolution du génome du SARS-CoV-2 qui suggère que les mutations s’accumulent à un rythme de 1 ou 2 mutations par mois et que le coronavirus est apparu en octobre – novembre 2019.

Duchene, S., Featherstone, L., Haritopoulou-Sinanidou, M., Rambaut, A., Lemey, P., & Baele, G. (2020). Temporal signal and the phylodynamic threshold of SARS-CoV-2. Virus Evolution, Volume 6, Issue 2, July 2020, veaa061, https://doi.org/10.1093/ve/veaa061

La cible du vaccin développé par Pfizer BioNtech est la protéine Spike en entier.

Polack, F. P., Thomas, S. J., Kitchin, N., Absalon, J., Gurtman, A., Lockhart, S., ... & Gruber, W. C. (2020). Safety and efficacy of the BNT162b2 mRNA Covid-19 vaccine. New England Journal of Medicine.

La cible du vaccin développé par Astra Zeneca Oxford University est la protéine Spike.

Voysey, M., Clemens, S. A. C., Madhi, S. A., Weckx, L. Y., Folegatti, P. M., Aley, P. K., ... & Bijker, E. (2020). Safety and efficacy of the ChAdOx1 nCoV-19 vaccine (AZD1222) against SARS-CoV-2: an interim analysis of four randomised controlled trials in Brazil, South Africa, and the UK. The Lancet.

La cible du vaccin développé par ModeRNA est la protéine Spike.

Jackson, L. A., Anderson, E. J., Rouphael, N. G., Roberts, P. C., Makhene, M., Coler, R. N., ... & Beigel, J. H. (2020). An mRNA vaccine against SARS-CoV-2—preliminary report. New England Journal of Medicine.

L’analyse de 126 219 génomes provenant d'échantillons de patients récoltés par le consortium britannique COG-UK jusqu'au 15 décembre 2020 a permis d'identifier 1 777 mutations différentes modifiant la protéine Spike.

Genomics UK Consortium. COG-UK update on SARS-CoV-2 Spike mutations of special interest. 2020. Last accessed 12 January 2021.

Pour aller plus loin

Qu’est-ce qu’un variant du coronavirus SARS-CoV-2 ?

Comment un variant du coronavirus SARS-CoV-2 se répand-il ?

Quels sont les variants du coronavirus SARS-CoV-2 qui ont attiré l’attention ?

Que sait-on du variant britannique ?

Est-ce que les variants remettent en question l’efficacité des vaccins ?